Foire aux questions

  1. L’ adaptation
  2. Le PNACC
  3. Le recours
  4. Les co-requérant•es
  5. Les autres recours et l’impact juridique
  6. Les financements
  7. La collecte
  8. Je veux aider !

1.L’adaptation

Qu’est ce que l’adaptation juste aux changements climatiques ?

Face au changement climatique, nous devons agir sur deux plans :

  • L’atténuation : c’est la réduction des émissions de gaz à effet de serre, pour limiter la hausse des températures due aux activités humaines
  • L’adaptation : c’est l’ajustement au climat actuel ou attendu ainsi qu’à ses conséquences

L’adaptation doit être juste, et donc prendre en considération les vulnérabilités de chacun•e. La capacité à faire face aux évènement climatiques, et donc à s’adapter, n’est pas la même pour tous•tes, tant chez les personnes physiques et morales que pour les collectivités et les territoires. Une femme enceinte est par exemple plus à risque en cas de canicule. L’adaptation juste vise à mettre en place des mesures bénéficiant à toutes et tous.

Quelle est la différence avec l’atténuation ?

L’atténuation cherche à limiter le changement climatique. Concrètement, cela correspond à toute action humaine visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre ou à renforcer les puits de gaz à effets de serre (les forêts, les sols, les océans…). L’atténuation et l’adaptation sont complémentaires : ce sont les deux faces d’une même pièce. Plus on lutte contre le changement climatique, moins on devra s’adapter à ses conséquences.

L’adaptation aux changements climatiques est-elle plus importante que l’atténuation ?

Lutter contre les causes du changement climatique, en réduisant les émissions de gaz à effet de serre, est la première solution pour protéger les territoires et les personnes. Seulement, les effets du changement climatique sont déjà là, et nous, citoyen•nes sinistré·es,en sommes la preuve. Nous avons donc besoin de faire les deux de concert. Adapter ne signifie pas renoncer à l’atténuation, au contraire les deux vont souvent de pair.

Par exemple,

  • Créer des parcs permet de limiter l’effet d’îlot de chaleur urbain, de permettre la pénétration de l’eau, de refroidir les villes et de limiter la pollution de l’air (adaptation), mais cela crée également des puits de carbone (réduction des émissions).
  • La rénovation thermique permet de mieux vivre dans son logement en cas de canicule (adaptation), mais permet aussi des économies d’énergie et donc de réduire les émissions gaz à effet de serre.

 
Pour aller plus loin :
https://www.oxfamfrance.org/climat-et-energie/attenuation-et-adaptation-au-changement-climatique-tout-comprendre-des-differences/

Le sujet de l’adaptation est-il une priorité en France ?

Les événements climatiques en France sont nombreux et récurrents, il n’y a qu’à regarder l’actualité récente : le cyclone Chido à Mayotte en décembre 2024, les inondations en Bretagne en février 2025, le cyclone Garance à La Réunion en mars 2025. Nous le savons, ces événements vont être amenés à se multiplier et à s’amplifier. Chaque fois, ils entraînent des morts et des sinistres. Si nous ne contraignons pas l’Etat à adapter maintenant les territoires, nous acceptons que ces morts et ces pertes s’accumulent.

Adapter les territoires permet par ailleurs de répondre à d’autres priorités : créer des emplois et améliorer les conditions de vie de toutes et tous notamment.

Quelle est la responsabilité des collectivités territoriales dans l’adaptation ?

L’adaptation aux risques climatiques est spécifique à chaque territoire : les solutions à mettre en place dans le Nord face aux inondations ne sont pas les mêmes que celles dont le Sud a besoin pour les vagues de chaleur. Les collectivités territoriales ont donc toute leur part à prendre dans l’adaptation des espaces qu’elles gèrent. Toutefois, l’Etat, qui a la responsabilité de protéger les habitant·es sur tous les territoires, ne fournit pas aux collectivités territoriales les financements et les expertises nécessaires. Nous attaquons donc l’Etat pour qu’il outille correctement les collectivités territoriales.

La France est-elle plus en retard que les autres pays européens sur l’adaptation aux changements climatiques ?

Loin d’être championne de l’adaptation, la France est à la traîne.

Comme le Gouvernement a fait le choix de renoncer à donner aux enjeux d’adaptation une base législative, et n’a toujours pas présenté un cadre réglementaire, la France reste clairement en-deçà des recommandations de la Commission européenne. Cette dernière a fait une recommandation à la France à ce sujet : « Pour relever les ambitions en matière d’adaptation, une étape importante devrait être l’adoption d’un cadre juridique approprié pour la politique climatique nationale, qui fixe des objectifs d’adaptation contraignants et régulièrement mis à jour, afin de mesurer les progrès globaux accomplis pour renforcer la résilience. »

Cette mise en garde n’est pas nouvelle, mais s’inscrit dans le contexte d’autres recommandations en ce sens, comme la stratégie sur l’adaptation de 2021. Alors que d’autres pays européens ont déjà donné « des cadres juridiques contraignants » à des politiques d’adaptation (Commission européenne, 2023), la France s’y refuse. Le 3e PNACC n’a pas permis non plus de créer un cadre juridique contraignant pour l’adaptation.

Bien au contraire, le 3e PNACC reste largement dépourvu de cibles concrètes et ce alors même que le Parlement européen a demandé aux Etats membres de définir des « objectifs contraignants et quantifiables » dans leurs plans nationaux d’adaptation dès 2020.

Si l’Etat ne fait pas assez en matière d’adaptation, quelles seront les conséquences à plus long terme, à échéance 10 ans 20 ans ?

L’inaction de l’État en matière d’adaptation au changement climatique aura des conséquences graves et irréversibles sur les populations, l’économie et les infrastructures françaises.

  1. Une aggravation des catastrophes climatiques et des pertes humaines
  2. Une explosion des coûts économiques
  3.  Une vulnérabilité accrue des territoires et une injustice sociale renforcée

Les populations les plus fragiles seront les plus touchées : les précaires, les groupes marginalisés, les personnes âgées et les populations en milieu rural, dans les quartiers populaires ou dans les territoires ultra-marins seront les premières victimes​.

Combien y a-t-il de sinistré·es climatiques en France ?

Il est difficile d’estimer précisément le nombre total de sinistré·es climatiques en France, mais les événements extrêmes liés au climat ont déjà causé des dommages massifs. Rien que pour les dernières catastrophes climatiques les plus médiatisées, les victimes se comptent en dizaines de milliers de personnes.
A titre d’exemple :

  • Les inondations dans le Nord et le Pas-De-Calais de l’hiver 2023 à 2024 ont causé 33 037 sinistres pour les particuliers (Rapport sénatorial).
  • Plus de 10,4 millions de maisons individuelles sont fortement menacées par le phénomène de retrait-gonflement des argiles : c’est la moitié des maisons individuelles.
  • En 2024, la chaleur a causé 3 700 décès en France et 55% des Français·es ont déclaré avoir souffert de la chaleur à leur domicile pendant au moins 24 heures en 2023.
  • Dans les territoires ultra-marins, l’accès à l’eau est tout sauf garanti : à Mayotte, la situation est encore plus critique. Avant même le cyclone Chido, l’accès à l’eau y était “presque impossible”, entraînant des multiplications de cas de diarrhées aiguës, de déshydratation et de gastro-entérites.

Le constat est indéniable : les conséquences du changement climatique sont déjà là et elles vont continuer à s’amplifier.

2.Le PNACC

Qu’est ce que le PNACC ? 

Le Plan National d’Adaptation au Changement Climatique est un outil de planification étatique qui vise à présenter des mesures concrètes pour limiter les effets négatifs du changement climatique en France. Il constitue le document cadre de l’État sur l’adaptation.

Le gouvernement a dévoilé le 3e PNACC en mars. Quels sont les points forts et les points faibles de ce plan ? 

S’il contient quelques avancées ponctuelles, celles-ci restent largement insuffisantes face à l’ampleur des besoins. Faute de moyens budgétaires à la hauteur des enjeux, ce plan accumule les lacunes et laisse de nombreuses questions cruciales sans réponse.

En bref :

  • Le PNACC-3 souffre d’un grave manque de financements, compromettant sa mise en œuvre effective. Les fonds mobilisés (Fonds Barnier, Fonds Vert, Agences de l’eau) sont insuffisants et souvent détournés d’autres priorités essentielles, comme la préservation de la biodiversité, la transition énergétique ou la justice sociale.

Sur plus de 310 actions proposées par le plan, seules 48 font l’objet d’un chiffrage ou d’une évaluation budgétaire. 

Les mesures de protection de la population face aux inondations ne sont, par exemple, à ce jour pas financées (mesure 3 du PNACC-3). C’est également le cas pour beaucoup de mesures concernant l’agriculture (mesures 36 et 37 du PNACC-3).

  • Le PNACC-3 repose largement sur des mesures incitatives ou de nature incrémentales, laissant la population sans protection réelle face aux événements climatiques. 

Exemples : 

Pour la mesure 9 (« Adapter les logements au risque de fortes chaleurs »), les actions consistant à « améliorer la connaissance de la performance du parc de bâtiments vis-à-vis du confort d’été » (action 1) et « sensibiliser le grand public et les professionnels à la nécessité d’adapter les logements au climat futur » (action 4) (1). Est par exemple encore en “réflexion” le fait d’introduire une exigence pour que les formateurs MaPrimeRénov aient une expertise concernant l’adaptation des logements aux fortes chaleurs !

Pour la mesure 5 (« Protéger la population des désordres sur les bâtiments liés au retrait-gonflement des argiles »), les actions consistant à « améliorer la connaissance » (action 1), « renforcer l’information des élus et des citoyens sur ce phénomène » (action 5) ou « développer la culture du risque pour préparer la population française à faire face à l’évolution des risques » (action 6).

  • Le PNACC-3 ne met pas en place un système de suivi et d’évaluation permettant de mesurer efficacement les progrès accomplis en matière d’adaptation au changement climatique, de diminution de l’exposition aux risques et de réduction des vulnérabilités. Il n’effectue pas non plus de retour d’expérience sur les plans précédents.
  • Le PNACC-3 ne tient pas compte des populations les plus vulnérables, qui sont à la fois plus exposées et qui ont moins de moyens pour s’adapter (ménages précaires, femmes, enfants, personnes âgées, groupes marginalisés). Tous les territoires ultra-marins sont laissés pour compte, alors qu’ils concentrent une multiplicité de risques climatiques sur des territoires déjà vulnérables.

Exemple : patients souffrant de pathologies comme l’épilepsie (vagues de chaleur) ; crise existante d’accès à l’eau ou risque cyclonique à Mayotte.

(1) Ibid., p. 91 et suiv., soulignement ajouté. 

3.Le recours

Qu’est-ce que ce recours ?

Ce recours est une action en justice contre l’Etat, menée par des sinistré·es et associations, dont les organisations de l’Affaire du Siècle, qui ont décidé d’unir leurs forces pour obtenir les mesures nécessaires pour nous protéger face aux risques climatiques. 

En détail

L’action engagée repose sur un recours pour excès de pouvoir qui permet de contester devant la justice administrative une décision de l’État jugée illégale. Dans ce cas précis, il est utilisé pour contester les insuffisances du PNACC-3 et plus largement des politiques publiques d’adaptation au changement climatique, afin d’obtenir leur renforcement.

Le recours ne vise pas à obtenir d’indemnisation pour les sinistrés et associations : son objectif principal est d’obtenir  le renforcement du Plan National d’Adaptation au Changement Climatique, ainsi que l’adoption de toutes mesures utiles permettant d’assurer, ou de renforcer, l’adaptation de la France aux effets du changement climatique.

Ce recours est porté directement devant le Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative française. En effet, le PNACC-3 est un acte pris par les ministres, ce qui impose de saisir le Conseil d’État en premier et dernier ressort, conformément au Code de justice administrative.

La présente demande est adressée à l’Etat pour lui permettre d’y répondre : plus précisément, elle est adressée au Premier Ministre et aux Ministres chargés de la mise en œuvre des mesures du plan national d’adaptation au changement climatique. Cette demande préalable est nécessaire pour pouvoir, en cas d’absence de réponse ou de réponse insatisfaisante de l’Etat, procéder au dépôt de la requête au Conseil d’Etat.

Devant quel tribunal a été déposé ce recours et pourquoi ? 

Nous saisissons le Conseil d’Etat directement : le PNACC étant un acte pris par les ministres, il faut saisir le Conseil d’État directement en premier ressort.

Pourquoi une action en justice contre l’Etat ? 

Tout simplement parce que l’Etat a une obligation de lutter et de s’adapter aux conséquences du changement climatique, en nous protégeant. Cette obligation découle notamment  de la Charte de l’environnement et de la Convention Européenne des Droits de l’Homme.

En refusant ou en tardant à mettre en place des solutions concrètes de prévention et de protection face aux risques climatiques, il nous met en danger et ne respecte plus nos droits les plus fondamentaux. En tant que citoyen·nes, nous sommes légitimes à faire valoir nos droits devant un tribunal et décidons donc de le faire. 

Pourquoi une action en justice plutôt qu’un autre mode d’action ? 

Nous savons que la justice a du pouvoir sur l’Etat. On peut citer la récente victoire dans le recours de l’A69, qui a mené à l’interdiction du projet autoroutier, ainsi que l’Affaire du Siècle et l’Affaire de Grande-Synthe qui ont mené aux condamnations historiques de l’Etat, reconnaissant l’illégalité de non-respect de ses engagements climatiques. 

Le temps de la justice est très long. Que pensez-vous pouvoir obtenir réellement avec ce recours et en quel laps de temps ?

Ce nouveau recours a un double objectif : obtenir une décision judiciaire qui oblige l’État 

  1. à prendre des mesures concrètes d’adaptation au changement climatique, 
  2. mais aussi peser immédiatement sur le débat public et les décisions politiques.

À court terme, dès son dépôt et grâce à la médiatisation, il mettra la pression sur l’État, notamment avec la mise en avant des co-requérant·es qui subissent déjà les effets du dérèglement climatique (suscite des débats publics, attire l’attention sur le sujet…) . Cela peut forcer le gouvernement à ajuster rapidement ses politiques, comme cela a été le cas après l’Affaire du Siècle. 

A moyen terme, le recours peut pousser l’État à adopter des mesures préventives pour éviter une condamnation, activant ainsi une dynamique de changement même sans verdict immédiat.

Quelles mesures concrètes demandez-vous à l’Etat de mettre en place à travers ce recours ?

Générales 
Faire reconnaître que l’Etat a l’obligation de proposer et mettre en place des mesures qui nous protègent face aux risques climatiques : inondations, vagues de chaleur, etc…
Dédier plusieurs milliards d’euros par an au financement de ces mesures, répartis justement sur le territoire français.
Prendre en compte et répondre aux besoins des populations particulièrement exposées et vulnérables afin de réduire les inégalités sociales (personnes précaires, handicapées, minorités de genre et de race, etc…), notamment les enjeux spécifiques des territoires dits d’outre-mer. 
Garantir l’assurabilité et le soutien de tous·tes face aux risques climatiques.
Accès à l’eau
Rénover en urgence les réseaux de distribution d’eau pour réduire les pertes et assurer le développement et la résilience des réseaux. 
Intégrer l’histoire et les dynamiques coloniales dans les politiques de gestion de l’eau dans les territoires d’Outre-Mer, en concertation avec les populations locales concernées.
Inondations
Avoir une planification du risque inondation, tenant compte du changement climatique, sur l’ensemble du territoire. 
Respecter les engagements limitant l’artificialisation des sols. 
Avoir un plan d’action concret (calendrier, méthodologie, financement) pour préserver, entretenir et restaurer les écosystèmes aquatiques grâce à des solutions fondées sur la nature. 
Canicule
Adapter systématiquement les bâtiments à la chaleur lors de leur rénovation énergétique, en commençant par les infrastructures publiques de santé, scolaires et sociales. 
Réformer le droit du travail pour que les travailleur·euses soit juridiquement protégé·es face à l’exposition aux fortes chaleurs (aménagement du travail, limitation du temps de travail voire interdiction d’activités en fonction des températures, sans perte de salaire) 
Pertes agricoles
Soutenir la transition vers des pratiques agricoles résilientes, économes en eau, avec un développement de l’agroécologie. 
Retrait-gonflement des argiles (RGA)
Assurer un financement des mesures de prévention du risque RGA. 
Prendre en compte le risque RGA dans les dispositifs publics d’aide à la rénovation énergétique (ex : MaPrimeRenov’), notamment pour permettre aux particuliers de payer des travaux de prévention dans les zones les plus à risques. 

A quoi ressemblerait une victoire citoyenne dans le cadre de ce recours ?

Une victoire citoyenne, ce serait un  succès judiciaire, suivi de changements structurels et durables dans la politique climatique de l’État et associé à une mobilisation citoyenne plus large en France et dans le monde !

  1. Une condamnation juridique de l’État
    • La reconnaissance par le juge que l’État ne respecte pas ses obligations légales en matière d’adaptation au changement climatique.
    • Une injonction à renforcer le Plan National d’Adaptation au Changement Climatique (PNACC), avec des objectifs clairs, contraignants et financés. 
  2. Des mesures concrètes
    • Voir le tableau du dessus sur les demandes.
  3. Une mobilisation citoyenne renforcée et un impact politique
    • Une prise de conscience accrue du public sur les lacunes de l’État en matière d’adaptation et donc une pression politique accrue sur les décideurs pour aller plus loin que les obligations légales minimales.
    • Une inspiration pour d’autres actions en justice, en France et ailleurs en Europe !

Les sinistré·es et associations ne demandent pas d’indemnisation dans le cadre de ce recours.

4.Les co-requérant·es

Qui fait partie de ce recours ? Combien y a-t-il de co-requérant·es ? 

Cette action en justice est portée par 14 demandeur·euses dont 5 individus sinistré·es, 6 associations citoyennes et 3 ONG. 

Participant·es :

  • Jean-Jacques, sinistré (canicule) 
  • Jean-Raoul, sinistré (canicule) 
  • Marie, sinistrée (RGA)
  • Jérôme, sinistré (inondation)
  • Salma, sinistrée 
  • Locataires Ensemble, représentée par Salim, association citoyenne (canicule)
  • Mayotte A Soif, représentée par Racha, association de sinistré·es (accès à l’eau)
  • Association Urgence Maisons Fissurées, représentée par Mohamed, association de sinistré·es (RGA)
  • Ghett’up, représentée par Rania, association citoyenne
  • Association Nationale des Gens du Voyage Citoyens, représentée par William, association citoyenne
  • Mouvement Inter-Régional des AMAP, représenté par Florent et Evelyne, association citoyenne (pertes agricoles)
  • Notre Affaire À Tous, représentée par Jérémie Suissa, ONG (justice sociale et lutte contre les crises climatique, de biodiversité et de pollution)
  • Oxfam France, représenté par Cécile Duflot, ONG (justice sociale et climatique)
  • Greenpeace France, représentée par Jean-François Julliard, ONG (justice climatique)


Pourquoi ces requérant·es ? Sur quels critères ont-iels été sélectionné·es ?

Ce recours réunit à la fois des citoyen•nes qui ont subi un sinistre climatique (inondation, vagues de chaleur, pertes agricoles, etc.) et des associations qui les soutiennent. Ces sinistré·es, qui agissaient déjà au niveau local, s’attaquent désormais à l’Etat. Ils et elles ont fait face à des évènements qui surviennent désormais chaque année et qui touchent de plus en plus de personnes. 

Ces citoye·nes directement concerné·es apportent, avec leur vécu, leur expérience et leur expertise sur des risques ou des vulnérabilités spécifiques, des éléments pour enrichir les arguments juridiques et les demandes portées par le recours. L’intérêt à agir de chacun·e sera détaillé lors du dépôt de la requête formelle, quelques mois après le lancement. 

Les associations qui participent sont aussi essentielles au recours : elles apportent des connaissances fines du terrain et des expertises juridiques, qui permettent de soutenir les demandes des personnes sinistrées. Elles représentent également toutes les personnes sinistrées qui y adhèrent, et qui n’ont pas le temps suffisant pour se lancer dans un recours juridique.

Est-ce les sinistré·es climatiques qui ont sollicité les ONG ou l’inverse ? 

Les citoyen·nes qui participent à ce recours étaient déjà engagé·es personnellement ou rassemblé·es en collectif à l’échelle locale. Les associations de l’Affaire du Siècle leur ont proposé de travailler ensemble pour donner une dimension nationale à ce combat. Les sinistré·es climatiques sont  ainsi au cœur de ce recours à travers leurs témoignages, leurs expériences concrètes et leur impact sur les écritures juridiques. Les ONG utilisent leur outils et leur capacité à se faire entendre pour porter ces voix encore plus loin, pour assurer un soutien juridique et pour permettre d’obtenir ensemble une victoire juridique pour toutes et tous !

Quel est le rôle exact des ONG dans ce nouveau recours ? 

Les ONG jouent un rôle clé dans ce recours, mais elles ne sont pas les seules actrices. Elles apportent leur expertise juridique, leur capacité à mobiliser l’opinion publique et leur soutien aux sinistré·es qui souhaitent faire entendre leur voix.

Concrètement, leur mission est triple :

  • Un appui juridique : avec leurs équipes et avocat·es, elles construisent l’argumentation juridique du recours en s’appuyant sur des bases solides (droits fondamentaux, obligations européennes et nationales en matière d’adaptation au climat).
  • Une mise en lumière des témoignages : elles permettent aux sinistré·es climatiques de raconter leur histoire et d’expliquer pourquoi il est urgent d’agir, elles épaulent les demandeur.euse.s dans leur démarche. L’idée est de montrer que l’inaction de l’État a des conséquences humaines concrètes, aujourd’hui et pas seulement dans le futur.
  • Une pression politique et médiatique pour mobiliser la société civile, mettre l’État face à ses responsabilités et accélérer la prise de mesures concrètes via le plaidoyer.

Ce qui est important, c’est que ce ne sont pas les ONG qui portent le recours seules : ce sont les sinistré·es et les associations directement concernées qui sont en première ligne. 

5.Les autres recours et l’impact juridique

Quel est le lien avec le premier recours de l’Affaire du Siècle ?

Cette action judiciaire s’inscrit dans une dynamique où la justice a déjà joué un rôle clé pour imposer à l’État de respecter ses engagements climatiques. L’Affaire du Siècle et le recours de Grande-Synthe ont abouti à des condamnations historiques, entérinant l’illégalité de l’inaction climatique de l’État. La justice peut ainsi être un levier puissant pour protéger l’intérêt général et aujourd’hui permettre la mise en place d’un Plan d’Adaptation au Changement Climatique plus juste.

Ce nouveau recours s’inscrit dans la continuité de la pétition du premier recours : les 2,3 millions de signataires  sont toujours engagé·es avec nous, sur une demande qui reste la même : faire reconnaître la responsabilité de l’État dans la lutte contre le changement climatique et ses conséquences.

Vous dites que ce recours est inédit dans l’Union européenne. Des recours de ce type ont-ils déjà été lancés ailleurs dans le monde ?

C’est le premier recours dans l’Union européenne sur l’adaptation au changement climatique avec des sinistré•es directement touché·es. Il y a eu d’autres recours en Europe avec des citoyen•nes : les Aînées Suisses, les jeunes Portugais, etc – mais qui traitaient d’atténuation et non d’adaptation.

Le jugement rendu en 2024 au Royaume-Uni est, à notre connaissance, l’unique exemple existant d’un recours similaire sur l’adaptation. Il est actuellement en appel. (Friends of the Earth, 

Si malgré sa première condamnation, l’Etat n’a toujours pas pris de mesures efficaces contre les changements climatiques, peut-on espérer que ce recours change la donne ?

L’Affaire du Siècle a été une victoire juridique historique, reconnaissant la responsabilité de l’État dans l’inaction climatique. La pression des 2,3 millions de signataires et des gilets jaunes a permi d’obtenir la Loi Climat. 

Pour que le jugement soit respecté et que des actions supplémentaires et suffisamment ambitieuses soient mises en place, le recours est encore en appel. Nous souhaitons ainsi nous assurer que le préjudice écologique est entièrement réparé et que de nouvelles actions seront prises par l’Etat. 

Avec ce nouveau recours, nous allons plus loin : des sinistré·es directement touché·es et associations attaquent l’État sur un angle précis, celui de l’adaptation aux conséquences du changement climatique, qui est aujourd’hui largement sous-financé et mal pris en compte dans les politiques publiques.

Notre objectif n’est pas uniquement d’obtenir une condamnation symbolique, mais bien une obligation pour l’État de mettre en place des mesures d’adaptation transformationnelles, à la fois de prévention et de gestion des risques climatiques, avec un budget défini, un calendrier précis et une meilleure prise en compte des territoires vulnérables, notamment les territoire dits d’Outre-mer. 

6.Les financements

Comment financer à la fois la transition et l’adaptation quand on connaît le déficit budgétaire de la France ? Où trouver les moyens nécessaires ?

Attendre les catastrophes coûtera toujours plus cher que de les anticiper. Le Gouvernement lui-même souligne que chaque euro investi dans le fonds Barnier, qui sert à la prévention des risques climatiques, permet d’éviter jusqu’à huit euros de dégâts.

Comme rappelé par le Haut Conseil pour le Climat, différer l’engagement des mesures d’adaptation entraîne une augmentation des coûts sur le long terme. Il est également très clair sur le fait que “les financements favorables à l’adaptation dans le PNACC-3 restent très insuffisants”. Ces investissements sont donc indispensables pour que l’Etat protège sa population.

Ils ne devraient pas être compris comme un fardeau pour les finances publiques, comme le confirme l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) quand elle rappelle que : « les investissements d’adaptation sont économiquement et socialement rentables ». 

En privilégiant un modèle réactif et en refusant d’engager plusieurs milliards d’euros par an pour mettre en place des mesures d’adaptation transformationnelle, l’Etat ne propose pas de vision véritablement stratégique permettant de garantir l’amélioration de l’adaptation de la France au changement climatique.

En tout état de cause, les investissements dans l’adaptation ne devraient pas aller aux dépens de la lutte contre le changement climatique, car l’atténuation est indispensable pour réduire l’ampleur des dégâts.

Pour financer à la fois la transition et l’adaptation, il est crucial de réorienter la fiscalité en imposant des contributions plus équitables, notamment en ciblant les plus grandes fortunes et les entreprises les plus polluantes. L’introduction de l’ISF climatique, d’une taxe sur les profits, les dividendes ou encore les rachats d’actions des entreprises les plus polluantes (à commencer par les industries fossiles), la suppression des niches fiscales polluantes, la taxe carbone juste et la taxation des consommations de luxe permettraient de générer des fonds significatifs, estimés à 71,6 milliards d’euros par an (Manifeste fiscal Oxfam, p.6). 

7.La collecte

L’Affaire du Siècle a lancé une collecte de fonds, à quoi vont-ils servir ? 

Les fonds récoltés vont permettre de financer :

  • les frais juridiques pour préparer  les prochaines étapes du recours et notre argumentation face à l’Etat une fois qu’il nous aura répondu. 
  • le développement d’outils et d’actions de sensibilisation et de mobilisation des citoyen·nes sur les prochains mois. 
  • les salaires de nos expert·es dans les organisations qui produisent la stratégie de cette action inédite, coordonnent le travail juridique, décryptent les mesures prises, accompagnent les sinistré·es …
  • le travail de communication en ligne, sur les réseaux sociaux et auprès des médias pour réaliser un suivi des actions de l’Etat et s’assurer qu’elles ne restent pas au stade de promesses.

8.Je veux aider !

Je suis aussi un·e sinistré·e climatique, est-il possible de rejoindre le recours ? 

Il n’est pas possible de rejoindre le recours en tant que tel, mais nous vous invitons à vous inscrire à notre newsletter pour faire partie de la communauté de l’Affaire du siècle, en précisant que vous êtes vous-même sinistré·e ! 

J'aide !