Audience du 8 décembre : le rapporteur public refuse d’examiner la responsabilité de l’État dans les baisses d’émissions

Les associations de l’Affaire du Siècle alertent sur les conclusions du rapporteur public qui ne vont pas dans le sens d’une exécution effective de la condamnation de l’État français pour inaction climatique prononcée en 2021. Le rapporteur préconise au tribunal administratif de Paris de faire l’impasse sur l’origine des baisses récentes d’émissions, liée à des facteurs conjoncturels et extérieurs à l’action de l’État, mais également de ne pas considérer le retard climatique pris depuis la condamnation de 2021.

Lors de l’audience du 8 décembre 2023, le rapporteur public conclut à une exécution du jugement de 2021 par l’État. S’il reconnaît la logique et la pertinence des arguments des associations, il ne conseille pas au tribunal administratif de les prendre en compte dans sa décision. Certes, reconnaît-il, les baisses d’émissions sont dues à des facteurs exogènes et conjoncturels, les rares mesures prises par l’État n’ont pas pu avoir d’effet avant le 31 décembre 2022, et dans le même temps, les puits de carbone s’effondrent, entraînant un nouveau surplus d’émissions, mais ces éléments ne font, selon le rapporteur, pas partie du jugement de 2021. 

Le tribunal peut choisir de ne pas suivre ces conclusions. C’est ce qu’ont plaidé les avocats de l’Affaire du Siècle lors de cette audience du 8 décembre. Ils ont rappelé que deux visions et définitions du préjudice écologique se font face : celle de l’État et du rapporteur, qui définissent le préjudice écologique comme étant équivalent au surplus de 15 Mgt d’émissions, s’oppose à celle des associations, et selon elles à celle du tribunal en 2021, qui définissait clairement le préjudice comme les conséquences “liées” ou “nées” de ce surplus d’émissions. 

Le gouvernement ne peut décemment prétendre qu’il respecte ses objectifs climatiques alors qu’il se cache derrière la baisse des émissions liée à des facteurs qui n’ont rien à voir avec son action, à savoir la crise énergétique et un hiver 2022-2023 particulièrement doux. Pendant ce temps, il multiplie les petits pas et les reculs sur le climat. Au-delà du bilan comptable, il est impératif de vérifier que l’État est volontairement à l’origine de la baisse des émissions de CO2”, déclare Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France.

En pleine COP 28, nous sommes déçus des conclusions du rapporteur public qui ne sont pas à la hauteur des enjeux et moins ambitieuses que le jugement de 2021 qui, lui, allait dans le sens de la responsabilité de l’État. Ces conclusions dépolitisent complètement l’action étatique. Le tribunal peut encore se saisir de cette opportunité historique pour marquer le droit climatique au-delà des frontières françaises”, affirme Cécile Duflot, directrice générale d’Oxfam France. 

Quand 2,3 millions de personnes ont demandé à nos côtés au tribunal de regarder de plus près l’action climatique de l’État, que le gouvernement jugeait satisfaisante, la justice leur a donné raison. Après une condamnation historique en 2021, le tribunal doit être à la hauteur des attentes encore fortes des citoyen·nes et se donner les moyens de faire respecter sa décision”, ajoute Jérémie Suissa, délégué général de Notre Affaire à Tous.  

La dernière décision du Conseil d’État de mai 2023 va également dans le sens des associations : il faut urgemment garantir un meilleur suivi et une évaluation qualitative de l’action climatique de la France.

Le jugement est désormais attendu dans les prochaines semaines. La date n’est pas communiquée en amont aux parties. 

Contacts presse

Les équipes de Notre Affaire à Tous, de Greenpeace France et d’Oxfam France et leurs juristes se tiennent disponibles pour les interviews. 

Marika Bekier – Responsable presse, Oxfam France 06 24 34 99 31 / mbekier@oxfamfrance.org 

Cécile Cailliez – Responsable communication, Greenpeace France 06 13 07 04 29 / cecile.cailliez@greenpeace.org

Justine Ripoll – Responsable de campagne, Notre Affaire à Tous 06 42 21 37 36 / justine.ripoll@notreaffaireatous.org 

Notes aux rédactions 

Photos de l’Affaire du Siècle libres de droits pour la presse disponibles sur ce lien (des photos prises après l’audience seront ajoutées directement sur cette plateforme).

Rappel chronologique des grandes étapes du dossier juridique de l’Affaire du Siècle : 

  • 18 décembre 2018 : demandes préalables et lancement de la pétition Affaire du Siècle
  • 14 octobre 2021 : condamnation de l’État pour inaction climatique par le Tribunal administratif de Paris
  • 31 décembre 2022 : délais pour l’État pour se mettre en conformité avec le jugement
  • 14 juin 2023 : dépôt de la demande d’astreinte par les organisations de l’Affaire du Siècle
  • 3 novembre 2023 : versement du rapport commandé au Collectif Éclaircies au dossier juridique 
  • 8 décembre 2023 : audience
  • Fin décembre : jugement