Pourquoi cette affaire ?

La population française déjà exposée aux risques climatiques

Les enjeux sont immenses, car les conséquences du changement climatique sont déjà là et vont encore s’amplifier. Dans l’ensemble, 62 % de la population française est exposée de façon forte aux risques climatiques. 

Cette multiplication des catastrophes climatiques induit déjà de lourds dégâts. Ceux-ci risquent de doubler tous les trente ans pour atteindre une perte de 7 % du produit intérieur brut annuel de la France d’ici la fin du siècle

Inondations, vagues de chaleur, pénurie d’eau, retrait-gonflement des argiles, pertes agricoles… Ce recours, porté par des sinistré·es, cible ces risques majeurs dont la fréquence et l’intensité s’accroissent sous l’effet du changement climatique. Leur impact, déjà largement documenté et médiatisé, met en évidence l’inaction de l’État et l’urgence d’une stratégie d’adaptation efficace, financée et à la hauteur des enjeux.

Le plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC)

Le troisième plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC-3) a été présenté le 10 mars 2025 par la ministre Agnès Pannier-Runacher. Publié avec plus d’un an de retard, il ne répond pas aux défis croissants posés par l’intensification des dérèglements climatiques.

Des mesures insuffisantes et des secteurs clés laissés sans préparation

Malgré l’urgence, les mesures proposées restent insuffisantes, manquent d’ambition et, trop souvent, repoussent les actions nécessaires à plus tard. Dans certains domaines essentiels, où les besoins d’adaptation sont pourtant les plus pressants, l’impréparation est criante, exposant ainsi des populations et des territoires à des risques accrus.

Un manque de moyens

La mise en œuvre des mesures annoncées est largement compromise par l’absence de financements adaptés. Sans budget dédié, même les actions les plus consensuelles ne permettent pas d’avancer sur l’adaptation. Des moyens humains doivent également être affectés aux opérateurs de l’État et des collectivités territoriales pour accompagner la mise en œuvre des mesures sur le terrain.

Une stratégie aveugle aux inégalités et délaissant les territoires ultra-marins

Les ménages pauvres et modestes, femmes, enfants, personnes âgées, groupes marginalisés, sont en première ligne des conséquences du changement climatique : ils et elles sont à la fois plus exposé·es au risque et plus vulnérables puisqu’ils et elles manquent souvent de ressources économiques, sociales, culturelles, de mobilité et d’accès aux droits pour s’adapter. Pourtant, le PNACC-3 ne prend pratiquement pas en compte les inégalités d’exposition et de vulnérabilité aux risques climatiques. 

Le plan national d’adaptation au changement climatique ne répond pas non plus aux enjeux des territoires ultra-marins. Chaque territoire devrait disposer de trajectoires adaptées à sa situation géographique et des problématiques spécifiques devraient être prises en compte, comme l’absence de disponibilité du foncier, l’habitat informel, la protection face aux cyclones ou encore les défaillances structurelles en matière d’accès à l’eau. 

crédit : L'Affaire du Siècle

→ Mettre l’État face à ses obligations

Inondations à répétition dans le Nord-Pas-de-Calais, canicules répétées, cyclone dévastateur et crise de l’eau à Mayotte… Les effets du changement climatique sont déjà une réalité pour de nombreuses personnes en France, où les phénomènes extrêmes se multiplient et s’intensifient. Face à ces menaces, l’État reste largement défaillant : les politiques publiques d’adaptation au changement climatique sont insuffisantes, laissant des territoires entiers et leurs habitant·es dans une situation de grande vulnérabilité.

Alors que les assurances se désengagent progressivement des zones les plus exposées et que les collectivités territoriales peinent à obtenir des financements suffisants pour faire face aux catastrophes climatiques, l’État tarde à mettre en œuvre des solutions de protection efficaces. Pourtant, il en a l’obligation : la Charte de l’environnement, la Convention européenne des droits de l’Homme et la loi européenne sur le climat lui imposent d’adopter des mesures concrètes et adaptées pour protéger la population des effets du changement climatique.

Face à cette inaction, des sinistré·es de toute la France, accompagné·es par des associations et les organisations de l’Affaire du Siècle, ont décidé d’unir leurs forces et de saisir le Conseil d’État. L’objectif : faire reconnaître la responsabilité de l’État dans l’insuffisance des politiques actuelles d’adaptation et obtenir des engagements concrets pour renforcer la protection des populations face aux risques climatiques. Ce recours, le premier de ce type dans l’Union européenne, s’appuie sur des arguments juridiques solides et vise à contraindre l’État à respecter ses obligations.

Cette action judiciaire s’inscrit dans une dynamique où la justice a déjà joué un rôle clé pour imposer à l’État de respecter ses engagements climatiques. L’Affaire du Siècle et le recours de Grande-Synthe ont abouti à des condamnations historiques, entérinant l’illégalité de l’inaction climatique de l’État.

Avec ce recours, les sinistré·es demandent des mesures immédiates et adaptées aux réalités des territoires touchés. Ils et elles exigent que l’État finance à hauteur de plusieurs milliards d’euros par an des politiques d’adaptation efficaces qui prennent en compte les inégalités sociales et territoriales, notamment dans les territoires ultra-marins qui sont trop peu accompagnés dans leur adaptation, rendant les impacts climatiques souvent bien plus violents.

Alors que les politiques environnementales sont de plus en plus attaquées par les milieux économiques et l’extrême droite, en France comme en Europe, ce recours rappelle une vérité fondamentale : l’État a la responsabilité de protéger ses citoyen·nes face aux risques climatiques. S’il ne prend pas les mesures nécessaires, il engage sa responsabilité devant la justice.