Le secteur de l’aviation, bientôt taxé à hauteur de son impact climatique ?

A Lufthansa Airbus takes off from Berlin Tegel airport during sunset. The Vattenfall power station Reuter West is seen in the background, illustrating air pollution. Panorama Berlin Airport Tegel Otto Lilienthal, Airbus der Airline Lufthansa startet in den Abendhimmel kurz vor Sonnenuntergang, hinten Vattenfall Kraftwerk Reuter West.

 

Saviez-vous qu’à l’heure actuelle, en France, les billets d’avion sont très peu taxés ? Un an après le début du mouvement des Gilets Jaunes, qui s’insurgeait contre une taxe carbone qui affecterait en premier lieu les ménages les plus pauvres, le kérosène des avions n’est lui toujours pas taxé. Une aberration quand on sait que le secteur aérien est responsable d’au moins 5% de la contribution humaine aux changements climatiques.

Le trafic aérien, qui a doublé au cours des 20 dernières années, devrait à nouveau doubler d’ici 2036. En Europe, les émissions de gaz à effet de serre de l’aérien ont augmenté de plus de 25% entre 2013 et 2018.

Pourtant, l’aviation jouit d’une fiscalité particulièrement avantageuse.
En France, “le kérosène est le seul carburant d’origine fossile dont la consommation ne supporte aucune taxe” note le Réseau Action Climat dans un rapport de 2017. A titre de comparaison, les taxes constituent environ 60% du prix d’un litre d’essence.
Les vols intérieurs se voient appliquer une TVA réduite à 10%, et un taux de… 0% pour les vols internationaux !
Enfin, le gouvernement a bien proposé une éco-taxe sur les billets d’avion, mais avec des montants de 1,5€ à 18€, elle reste très faible.

 

Taxer l’avion, tout le monde y gagne

Si elle veut faire sa part et atteindre la neutralité carbone, la France doit mettre en place une fiscalité au service de la lutte climatique, et mettre fin aux avantages accordés au secteur aérien.

Une solution d’autant plus juste que le secteur aérien est avantagé par rapport aux autres secteurs des transports. Ainsi, alors que prendre le train émet 14 à 45 fois moins de CO2 par kilomètre, le transport ferroviaire est loin de bénéficier des avantages fiscaux de l’avion.

Les dix aéroports français les plus fréquentés sont situés dans des agglomérations desservies par des trains à grande vitesse. 20% des émissions de gaz à effet de serre de l’aérien français sont dus aux vols domestiques. Ce constat souligne l’urgence à favoriser des modes de déplacement alternatifs à l’avion et à aller vers une fin des lignes aériennes pour lesquelles une alternative ferroviaire existe. C’est d’ailleurs une des actions prioritaires que nous demandons à l’Etat de mettre en oeuvre.

D’autant plus que ces niches fiscales – et donc le manque à gagner en termes de finances publiques – servent un secteur qui concerne avant tout les classes les plus favorisés. Une étude menée en 2015-16, dans les 12 principaux aéroports de la France métropolitaine, montre en effet que les ouvriers ne représentent que 2% des passagers ; les agriculteurs, artisans, commerçants personnes sans emploi, 4%. 20% des personnes les plus aisées prennent autant l’avion que 80% des moins riches.

 

Le Parlement volera-t-il à la rescousse du climat ?

Le Parlement examine en ce moment le Projet de Loi de Finances (PLF). Moment clé de la vie politique française, le PLF pourrait être un véritable levier pour une transition écologique et sociale… si volonté politique il y a.

Rien qu’en France, une taxe sur le kérosène, mise en place au niveau européen, pourrait rapporter 3,6 milliards d’euros par an, afin par exemple de développer des transports plus respectueux de l’environnement.
A l’échelle européenne, le manque à gagner lié au taux réduit de TVA est estimé à 10 milliards d’euros par an. Des recettes potentielles qui pourraient financer des modes de transports plus écologiques et au service de l’ensemble de la population, et pas seulement des plus aisés.

Alors que plus des trois quarts des Françaises et Français disent que la crise climatique est un sujet qui les préoccupe au quotidien, et que 65% se disent prêt-e-s à ne plus prendre l’avion, le Parlement se décidera-t-il à écouter et enfin agir ?